Les loyers professionnels enfin soumis à la TVA dès janvier 2018 - Du nouveaux
Dès janvier prochain, les nouveaux loyers professionnels seront soumis à TVA. Autrement dit, les promoteurs et propriétaires pourront récupérer 21% sur les baux locatifs, parfois très longs, négociés avec les occupants. Tout le secteur immobilier accueille positivement la mesure, qui lui donne de nouvelles marges inespérées.
Tous sont sur la même longueur d’ondes positive, courtiers, propriétaires, investisseurs, fiscalistes… et même juristes. C’est suffisamment rare pour le souligner. Mais encore faut-il pouvoir expliquer en quoi cette mesure fiscale prise par le gouvernement et réclamée depuis plus de 15 ans par le secteur immobilier semble avoir tant d’atouts.
Alors, allons-y. Jusqu’à présent, un propriétaire d’immeuble neuf qui le mettait en location ne pouvait pas récupérer la TVA sur loyer négocié avec un occupant professionnel (corporate) alors qu’il devait de l’autre côté facturer avec TVA de 21% la vente de ce même immeuble à un acheteur potentiel, une fois le rendement locatif des murs assuré. Désormais, il pourra appliquer la TVA sur ce contrat locatif, et donc dégager 21% de marge supplémentaire qui mettront de l’huile dans les rouages lors de la négociation du bail et lors de la revente. Une belle bouffée d’oxygène pour le marché de la promotion et de la construction immobilières professionnelles.
Mais pour quoi faire exactement? Pour Eline Van Impe (head of tax chez AG Real Estate), qui préside la commission fiscalité de l’Union professionnelle du secteur immobilier (UPSI), cette mesure permet d’abord de rendre plus simples et plus transparents les contrats d’occupation des espaces professionnels concernés.
"Cette proposition de loi a déjà été sur la table du gouvernement lorsque Koen Geens était ministre des Finances, mais elle avait été mise au placard à la dernière minute. Il faut donc avant tout remercier le nouveau président de la commission logistique à l’UPSI, Wim Heylen (Heylen Groep), pour son acharnement à sensibiliser les administrations. Cela faisait tellement mal à cet entrepreneur belge très actif dans l’e-commerce de devoir aller investir dans des entrepôts aux Pays-Bas et de voir la Belgique perdre des parts de marché à cause de la complexité de sa réglementation qu’il n’a eu cesse d’alerter les responsables publics sur la nécessité d’aligner notre régime TVA sur celui des pays limitrophes et concurrents directs. Dans le secteur logistique, le régime TVA actuel n’est pas du tout adapté pour les activités d’e-commerce, ce qui crée une grande insécurité fiscale pour les contrats d’occupation des différentes fonctions répertoriées (handling, entreposage, bureaux, etc.). En pratique, les sociétés devaient souvent passer par un leasing de 15 ans avec option d’achat: une formule trop lourde et trop longue – donc non concurrentielle – pour ce type de secteur. Nous sommes donc retournés voir Kris Peeters, ministre en charge du Travail, au printemps dernier, pour lui expliquer la nécessité de modifier d’urgence la circulaire sur ce segment très compétitif. Et on a constaté peu après que la mesure de soumission à la TVA était remontée sur la table du gouvernement pour être étendue à tous les locataires professionnels", détaille Eline Van Impe.
Effectif dès 2018
"Tout le monde a reçu des informations succinctes, mais on attend les détails de la loi-programme qui cadrera le nouveau régime et sera effective dès janvier prochain. Pour autant que les locataires soient soumis au régime TVA, bien sûr…", tempère Michaël Niego, conseiller financier chez CBRE.
Selon lui, nombre d’occupants publics comme la Régie des Bâtiments, les administrations ou la Commission européenne ne sont pas soumis au régime TVA. Idem pour certains secteurs professionnels, comme les banques, les assurances ou le non-marchand (hôpitaux ou institutions) qui ne peuvent pas récupérer la TVA. D’autres ont préféré devenir propriétaires des murs ou ont opté pour des contrats sous emphytéose ou sous régime usufruit/nue-propriété portant sur l’ensemble d’un immeuble ou plus souvent sur la société qui en détient les actifs.
Superficie concernée
"Nous avons tenté, en partenariat avec le conseil en immobilier CBRE, de chiffrer le nombre de baux concernés par la nouvelle mesure. Nous l’estimons à 40% du total de la superficie professionnelle prise en occupation, tous segments confondus (bureau, commerce, logistique et industriel)", reprend Eline Van Impe. Celle-ci prévoit d’ailleurs une hausse des recettes à l’impôt des sociétés, les "assets deals" (vente simple d’un immeuble avec TVA) remplaçant dans pas mal de cas les habituels "share deals" (vente d’une société détenant un immeuble).